"Le secret de l'Atlantide"
Par Julie Denuelle
A Rouillas-Bas, en Auvergne, le temps était souvent humide mais aujourd’hui, le soleil semblait moins timide qu’à son habitude et il faisait bon en cette journée de printemps. Chez les Nolvek, on se préparait à fêter le septième anniversaire de Lyra. La petite fille s’était levée tôt ce matin pour chercher ses cadeaux en vain. L’enfant était une boule de nerf que seule sa mère parvenait à calmer. Son père était mort cinq ans auparavant, emporté par la maladie, mais cette absence n’avait entamée en rien l’air enjoué de cette blondinette aux yeux couleur vermeil. C’était avec impatience qu’elle attendait 15h00, l’heure où sa fête allait commencé. De nombreux camarades de classe étaient invités et tout était presque prêt. En cuisine, sa mère finissait de préparer le gâteau. Il n’était que 12h10, mais la petite voulût sortir, on ne savait jamais!
Au moment où elle arrivait dans le hall, on sonna et l’enfant se précipita sur la porte pour crier:
“_ Grand-mère!
_ Bon anniversaire mon lapin!”
Vandara Nolvek tendit son cadeau à la petite-fille qui s’empressa de l’ouvrir. Heureuse du cadeau qu’elle venait de recevoir, elle conduisit sa grand-mère en cuisine.
“_ Dhélia! Ma chérie! Comment vas-tu? s’écria la grand-mère.
_ Très bien maman. Donne-moi tes affaires! Je vais te débarrasser!”
Dhélia sortit de la cuisine et la grand-mère se retourna vers Lyra:
“_ Alors ma puce! Et tes cadeaux?
_ Je n’ai pas réussi à les trouver!
_ Ta mère doit les cacher en hauteur! répondit Vandara.”
Puis elle prit la petite dans ses bras:
“_ Oh! Grand-mère! Ton collier! Tu ne trouves pas qu’il a perdu sa couleur?!”
Le sourire s’effaça du visage de la grand-mère qui mit instantanément sa main sur la pierre qui ornait son collier pour la cacher. Elle aussi avait remarqué, et elle savait pourquoi sa pierre se ternissait mais comment l’annoncer à sa famille, à sa fille surtout. Dhélia revint et les Nolvek se mirent à table.
Vers 15h00, les camarades de Lyra était tous là et la fête commençait dans le jardin. La petite s’amusait déjà et les enfants jouaient à l’élastique. Vandara sortit accompagnée par sa fille. Elles se baladèrent aux alentours du parc qui faisaient partit de la propriété des Nolvek. Vandara sentait que ses forces allaient bientôt commencer à la quitter, il fallait pourtant qu’elle révèle son secret à sa fille, et cela devenait urgent. Sa pierre, autrefois bleu marine, était déjà devenue bleu roi et ce n’était que le début.
Elles marchèrent un moment sur le chemin boisé et Vandara entama la conversation:
“_Dhélia, ma chérie, j’ai quelque chose d’important à te dire.
_Qu’est-ce qu’il y a maman? Tu as un problème? On peut rentrer pour en parler si tu veux?
_ Non! Non! Je dois te le dire, et maintenant! Cela ne concerne pas ma santé! Enfin si, mais plus particulièrement ma vie! Toute ma vie! Et elle est bien plus longue que tu ne le penses!
_ Maman! Mais qu’est-ce que tu racontes? A 57 ans, tu as encore toute la vie devant toi!
_Il est là le problème! Je n’ai pas exactement 57 ans, j’ai en vérité plus de 11000 ans.
_ Maman! Tu perds la tête ou quoi?! 11000 ans, mais à qui veux-tu faire croire ça!
_A toi! Et il faut absolument que tu saches!
_ Mais savoir quoi?
_ Mon histoire! Celle que tu connais, c’est celle que j’ai inventée pour que tu aies une vie normale mais je pensais que ma pierre durerait plus longtemps! Du moins assez pour que je puisse te révéler mon secret en temps et en heures!
_ Maman je ne crois pas...” mais Dhélia fut coupée. Sa mère devait lui révéler le secret de ses origines avant qu’il ne soit trop tard. Elle reprit alors son explication:
“_Dhélia! C’est important pour moi! Tu dois savoir de quel peuple prestigieux tu descends! La pierre que tu m’as toujours vu porter à mon cou est ma pierre de vie, c’est l’Orichalque! C’est elle qui m’a permise de vivre si longtemps.
_ Mais enfin! S’il y avait une ‘pierre de jouvence’, je crois que ça se saurait!
_ Justement, l’Orichalque a disparu en même temps que le peuple qui l’a découvert, le peuple de l’Atlantide! Je sais que cette île est une légende, mais elle a vraiment existé!
_ Mais on a jamais retrouvé de vestiges!
_Ma chérie! Quand les Dieux veulent faire disparaître quelque chose, ils ne laissent rien sur leur passage! Laisse-moi te raconter ce qu’il s’est passé il y 11000 ans.”
A ce moment l’Orichalque baissa à nouveau d’intensité pour devenir turquoise. Vandara inspira profondément et commença alors le récit de ses origines, là ou la réalité était devenue une fiction.
“_ Il y a 11000 ans, le dieu Poséidon réclama à son frère Zeus une île dans l’océan Atlantique, au-delà des colonnes d’Hercule, ce qui lui fut accordé. Cette île à la faune abondante et à la flore exubérante, l’Atlantide, était un royaume parfait. Les atlantes rendaient grâce à Poséidon et évitaient les guerres fratricides. Chaque année, une jeune femme était choisie pour représenter Poseidon. Mais les nouvelles générations oublièrent le mode de vie des anciens et les guerres de conquête commencèrent. La lutte contre les athéniens fut la plus rude. C’est cette année là que les Dieux décidèrent de frapper l’Atlantide. Le jour de l’Ataia, la désignation de la représentante de Poséidon, dix jeunes filles furent choisies pour partir au royaume de Poseidon où l’une d’entre elles serait sacrée. Lorsque les jeunes femmes quittèrent l’île, les Dieux déchaînèrent leur jalousie et leur colère sur cette île qui ne se contentaient pas des privilèges qu’elles possédaient déjà. L’océan se souleva, le ciel gronda et la terre trembla. Justice était faite pour ce peuple qui fut décimé à l’exception des dix jeunes filles. Leur bateau n’atteignit jamais le royaume de Poseidon. Elles s’échouèrent sur le rivage le plus proche et voyagèrent jusqu’à Athènes où elles s’installèrent. Il ne restait de leur île que la pierre qu’elles portaient autour du cou, l’Orichalque, la pierre de vie de chaque atlante. Le bleu marine de cette pierre reflétait la vie de celui qui la portait. Les jeunes filles traversèrent les âges et les époques, sans vieillir, se remémorant chaque jour leur île glorieuse à jamais disparu, leur bonheur perdu. C’était la punition des atlantes pour avoir oubliés qui les avaient créés.
Je faisais partie de ces dix jeunes femmes, j’ai survécu au cataclysme de l’Atlantide et toute ma vie j’ai pleuré mon existence perdue. Je voyais mes enfants mourir et ma pierre gardait son bleu d’origine. Mais aujourd’hui tout est différent. Il y a trois semaines, Clito était la quatrième à voir sa pierre s’éteindre et maintenant c’est mon tour. Ma pierre est désormais bleu ciel, la dernière couleur avant mon voyage au royaume d’Hadès.”
En quelques minutes, Vandara avait dit ce qu’elle avait toujours gardé pour elle, elle dévoilait son lourd secret à sa fille. Dhélia ne savait pas quoi penser, ni ce qu’il fallait croire. Et puis son sentiment de doute se dissipa, maintenant elle avait peur. Elle réalisait qu’il y avait au moins une chose de vrai; la pierre de sa mère n’avait plus ce bleu profond d’autrefois. Dhélia ne voulait pas perdre sa mère, et pourtant elle remarquait que depuis le début de son récit, sa mère avait vieilli.
“_Tu me fais peur maman!
_Il ne faut pas! Je vais partir rejoindre ma famille, mon peuple, mon île! Le royaume d’Hadès m’attend et je n’ai plus la force de vivre. Garde mon collier en souvenir et n’oublie pas d’où je viens.
_Ne dis pas ça, je vais t’amener à l’hôpital, ça ira mieux!
_ Inutile! L’Orichalque va devenir blanc d’un instant à l’autre, et je vais disparaître comme j’aurais dû le faire il y a 11000 ans. Je t’aime très fort Dhélia. Embrasse Lyra pour moi!”
C’est à ce moment là que la pierre devint blanche. Vandara quitta sa fille dans une lumière bleue. La paix avait enfin atteint son coeur, elle allait enfin vivre paisiblement avec ceux qui l’avait quittée depuis si longtemps!
Dhélia ramassa le collier tombé sur le sol, les larmes avaient envahi son visage lorsqu’elle dit dans un souffle:
“ Moi aussi je t’aime maman...”.
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